Histoire
La Seconde Guerre Mondiale
Le départ Tous ceux sur le départ sont conseillés par le recteur d'attendre. Il leur précise qu’il se préoccupe de la question avec les personnes compétentes : les patrons pêcheurs et le maire. Le lundi 24 juin au soir, vers 22h, deux bateaux viennent se mettre à la cale neuve. Il s'agit du Rouanez ar Mor et de la Velleda. Devant le nombre de volontaires, il est décidé de réarmer en urgence trois autres bateaux. Le Rouanez ar Péoc'h, le Maris-Stella et le Pax Vobis le seront dans la journée du 26. Ils seront suivis du Corbeau des Mers et du Yvonne-Georges. Tous les hommes sont sur le départ ce 24 juin. Les jeunes sont mélangés avec les vieux et sont partagés sur les bateaux. Avec la complicité d'anciens, de tous jeunes mousses se cachent sous les focs, car les patrons ne veulent pas embarquer de trop jeunes gens, 17 ou 18 ans, pas moins. Le plus jeune à réussir à partir a 12 ans, beaucoup ont 14 et 15 ans. Ils vont se battre et apporter leur pierre à cet édifice fragile qu’est la future victoire. Ils partent presque ensemble. Ils ont attendu que la nuit tombe pour larguer les amarres, parce que les jumelles ennemies sont à la Pointe du Raz. Les avions allemands rôdent et mitraillent le Raz de Sein. Les hommes ont peur de rater le dernier bateau. Ceux-ci partent surchargés. Sur le Prosper Cuillandre, ils étaient 26 à bord, sur la Velleda, ils étaient 52. Le poste avant était plein, le poste arrière aussi, et la salle des machines, pleine également. Du 19 au 26 juin 1940, ils sont 114 Iliens à quitter Sein.
Les épouses et les familles qui accompagnent les hommes sur le départ, se cachent derrière un gros tas de bois, de peur que les Allemands de la Pointe du Raz ne remarquent l’étrange mouvement inhabituel sur la cale. S’il y a autant de bois pour se cacher, c’est dû au fait que peu de temps avant, un bateau s’est échoué. C’est le Poul Du, dont le naufrage a permis aux bateaux de quitter l’île sans se faire remarquer, et à son humble manière a donc participé à la victoire. Le recteur bénit les hommes qui embarquent et il donne sa bénédiction au départ. Etant donné l'emprise qu'a la religion sur la population de l'île, elle n’est pas dissociable de la patrie. Les hommes ont beaucoup de Foi et la Patrie est tout. Sur un carnet de bord, on lira "Si le bon Dieu me demandait le sacrifice de ma vie pour sauver notre Patrie, avec plaisir je la lui offrirais. Que la volonté de Dieu soit faite, en tout et pour tout". Ils sont partis à la tombée de la nuit et ont chanté la Marseillaise. La traversée est longue. Pour éviter les yeux du continent et ceux du ciel, ils partent de nuit à travers la Chaussée de Sein, direction l’Armen puis tribord vers la Grande-Bretagne. Ils ont la chance d’un temps très doux et d’une mer d’huile. La Chaussée est habituellement meutrière mais cette fois, elle les laisse passer. Les bateaux sont souvent juste équipés d’un compas comme instrument de navigation, et bénéficient du savoir-faire des patrons comme compétence. La traversée dure 24 heures. Heureusement, chacun a emporté son panier pour manger et pour boire. |